La Russie ne serait pas encore prête pour la F1
Pour la manager de Vitaly Petrov, si la Russie a déjà un pilote et prochainement un Grand Prix, il lui manque une véritable culture de la Formule Un auprès de la population.
27 mars 2011, Vitaly Petrov monte pour la première fois sur le podium d’un Grand Prix de Formule Un, hissant du même coup les couleurs inédites de la Russie. Quelques mois plus tôt, en novembre 2010, le constructeur de voitures de sport Marussia, rachète 40% des parts de l’écurie Virgin dont il est un temps envisagé qu’elle participera à la saison 2011 sous licence russe. Mais avant cela, le 14 octobre 2010, Bernie Ecclestone et Vladimir Poutine signaient un accord pour l’organisation d’un Grand Prix à l’horizon 2014, dans la ville de Sotchi qui accueillera, la même année, les Jeux Olympiques d’hiver. Le circuit devrait d’ailleurs être tracé au sein même des installations olympiques, actuellement en cours de construction. La Russie semble donc s’éveiller à la Formule Un, et pourtant, selon Oksana Kossatchenko, manager de Vitaly Petrov, le circuit ne serait pas le plus gros chantier qui attende la Russie : « La Russie est un pays différent avec une culture différente. Le problème avec l’organisation d’un Grand Prix n’est pas seulement la construction d’un circuit, mais je suis vraiment concernée par la préparation du public. Nous n’avons pas le moindre média qui est spécifiquement dédié aux sports mécaniques en Russie » explique-t-elle. « En Angleterre, il y a beaucoup de magazines et en Russie nous avions le magazine F1 Racing, mais à cause de l’importance de l’investissement, ils ont annulé le projet. Si vous n’avez pas les médias vous ne pouvez donc pas avoir d’audience, et si vous n’avez pas d’audience, pourquoi devriez-vous préparer les tribunes principales si elles seront vides ? »
De ce point de vue, la Russie ne fait guère exception, la Chine, la Corée ou encore Singapour ayant reçu la Formule Un sans pourtant que la population ait une véritable culture du sport automobile. C’est la volonté de répondre à des investisseurs, à des volontés politiques et parfois à des constructeurs qui souhaitent une plus grande visibilité sur des marchés potentiels, qui est aujourd’hui à l’origine de projets de Grand Prix, plus que la pression des fans locaux. Ainsi est-on passé d’une politique visant à implanter un Grand Prix dans un pays avec une culture de la Formule Un à un raisonnement inverse, organisant un Grand Prix afin de favoriser l’émergence d’une culture de la F1, avec des échecs parfois cuisants comme l’atteste la faible fréquentation du Grand Prix de Turquie qui a précipité son éviction du calendrier 2012 bien que le circuit fasse l’unanimité en sa faveur.
Pour Oksana Kossatchenko, il faut donc que la Russie développe cette fameuse culture de la Formule Un, pour garantir, sur le long terme, la réussite de son Grand Prix : « Il y a des choses que nous devons faire […] mais nous ne pouvons pas le faire sans le soutien du gouvernement. C’est pourquoi nous avons encore quelques étapes à accomplir. Premièrement, il faut préparer les médias pour ensuite préparer le public puis les prochains pilotes russes. […] Pour le moment, il n’y a pas d’infrastructures en Russie, pas de séries de promotion et le karting n’est pas vraiment développé. C’est pourquoi c’est un investissement que nous devons considérer avant d’appuyer un Grand Prix de Russie. » La manager russe sait de quoi elle parle, son poulain ayant un parcours atypique, puisqu’il a fait ses débuts en Lada Cup, faute d’infrastructures à proximité de chez lui.